Quand Trump oublie le confort acoustique
Vous avez sans doute suivi l'actualité brûlante outre-Atlantique. Le magnat de l'immobilier, à la tête de la première puissance mondiale, a décidé — entre deux projets pacifistes visant à mettre fin aux guerres dans le monde — de transformer une aile de la Maison-Blanche pour y construire une salle de bal géante, dans un style Second Empire.
Si cet article ne vous révélera pas si Donald Trump obtiendra le prix Nobel de la paix, il est en revanche certain que ses équipes architecturales ne décrocheront aucun prix en matière de confort acoustique. Voici pourquoi.
Le confort acoustique d'une salle de bal ?
Une salle de bal, dont la vocation première est de permettre à des personnes de danser, possède en réalité de multiples usages. Elle peut également servir de salle de conférence ou de salle à manger. La différence majeure avec d'autres espaces réside dans sa polyvalence et sa capacité à accueillir un grand nombre de participants. Cette flexibilité a un impact considérable sur la conception du lieu, notamment en matière de confort acoustique.
En effet, qu'elle soit comble ou relativement vide, la salle doit présenter un comportement sonore cohérent, que ce soit pour de la musique amplifiée ou de simples conversations. Sans étude acoustique préalable, elle générera un inconfort certain lié à une réverbération excessive à vide, une mauvaise intelligibilité et un niveau sonore élevé lorsque la salle est pleine.Les convives devront alors hausser la voix, même à faible distance, pour se comprendre. Le phénomène s'amplifie évidemment avec le volume du lieu.
Un autre point critique concerne le chauffage et la ventilation. Les ventilo-convecteurs, souvent utilisés pour chauffer rapidement de grands volumes, sont bruyants. Il faut donc privilégier des systèmes silencieux, tout en assurant une ventilation efficace pour le soufflage et la reprise d'air. La difficulté est de maintenir un débit d'air suffisant sans altérer la qualité architecturale.
Nos conseils pour Donald Trump
Sur la base très parcellaire des visuels publiés dans la presse nationale, nous recommandons aux équipes de conception d'intégrer impérativement des surfaces absorbantes et surtout diffusantes, de manière homogène.
La mise en œuvre de panneaux ou de baffles suspendus n'est pas adaptée à ce type d'espace. Nous préconisons plutôt d'intégrer directement un absorbant en laine de verre de 50 mm derrière une toile tendue microperforée, dans les caissons de plafond. Cette solution permet d'obtenir un aspect monolithique, similaire à une finition plâtre, mais sans le défaut d'une réverbération excessive. Ce type de produit existe chez plusieurs fournisseurs — il sera donc tout à fait possible de trouver une solution « Made in USA ».
Attention toutefois : la toile ne pourra pas recevoir de décor après pose. Dans le cas d'un style « Mar-a-Lago » agrémenté d'une fresque romaine vantant le monde MAGA, le décor devra être imprimé numériquement.
Bien entendu, nous conseillons aux équipes architecturales de procéder à une modélisation acoustique numérique des locaux. Il est probable qu'il faille corriger la réverbération générale par un traitement partiel des murs. Ces traitements devront être à la fois diffusants et absorbants, afin de gérer également les basses fréquences.
Si le recours à des plaques de plâtre perforées semble peu envisageable, nous recommandons d'étudier le revêtement des colonnes pour en faire des diffuseurs. Les autres surfaces murales pourront être traitées en tissu tendu sur absorbant (50 mm étant sans doute suffisant).
Enfin, il est évidemment impossible de traiter le revêtement de sol : le style Mar-a-Lago proscrit la moquette, et celle-ci n'est de toute façon pas adaptée à une salle de bal. Il n'y aurait guère de différence acoustique notable entre un parquet et le marbre — ce dernier traduisant simplement le niveau de richesse du propriétaire.
La difficile question de la ventilation
La principale difficulté consistera sans doute à diffuser un soufflage à faible vitesse et à gérer la reprise d'air dans un volume aussi important en double flux. Nous recommandons de recourir à une ou plusieurs CTA équipées de silencieux sur les circuits de soufflage et de reprise. Le soufflage pourrait être réalisé via les colonnes — probablement en stuc et purement décoratives — à l'aide de microperforations nombreuses, afin d'éviter un flux d'air trop directif et de limiter les bruits de régénération. Pour la reprise d'air, nous conseillons de la réaliser par les banquettes ou directement par le sol.
Enfin, nous n'avons pas abordé le traitement des nuisances sonores vis-à-vis du voisinage. Il va de soi que, pour des raisons de sécurité, aucun tiers n'habite à proximité immédiate des lieux. Ce choix est plutôt judicieux — une mairie française, elle, n'aurait sans doute pas hésité à construire une salle des fêtes en mitoyenneté…
Acoucibe est un cabinet d'expertise spécialisé en acoustique architecturale et environnementale. Fondé en 2015, Acoucibe apporte une compétence technique et scientifique dans la conception et la réalisation de projets où l'acoustique revêt un intérêt notable. Face aux enjeux et décisions, Acoucibe oriente les choix techniques de ses clients en leur permettant d'optimiser les coûts de conception dans le respect d'un haut niveau de confort acoustique.







